Le Campiello perdu

Nouvelle d'Albert Valée

chapitre 3

Donc le but à atteindre dans mon cas, c’était l’endroit représenté sur cette carte postale et si ce lieu a été jugé digne de servir de figuration pour Venise, c’est qu’il devait être connu.
Le premier carabinier qui passe va faire l’affaire.
- No ! Sorry sir !

J’ai un doute là ! Londres, c’est pas en Italie quand même ? Pourquoi y me cause angliche, cet espèce d’enfoiré uniformisé ? Mais où va Venise s’ils se mettent à engager des anglais comme carabiniers.
C’est rien ! Un flic, c’est normal qu’il soit désagréable. C’est payé pour ça.
Je m’en vais demander au guichet d’un des embarcadères pour vaporetti, lui il doit être du coin.
- No ! Spiacente !

No !… j’avais traduit mais c’est quoi " spiiiatchièn’té ?…" quelque chose comme " patientez " peut-être ? Bon d’accord, j’attends.
Au bout d’une demi-heure, le bonhomme n’a semble-t-il pas encore trouvé… ou alors il m’a oublié. Je retourne donc lui demander.
- Ma no ! Signoré ! Io so spiiiatchèn’té ! No lo so !

Il ne devait pas me demander de patienter, tout à l’heure. Il a l’air furax, le bonhomme et me fait signe de déguerpir.
Je venais rencontrer un pas serviable à Venise, d’accord, y’en a partout mais les vendeurs noirs qui prolifèrent sur le pont des Scalzi, ce sont des rois de la débrouille, ils doivent connaître.
- Si toi m’acheter un powtefeuille, moi je dis l’endwoit, mon fwèwe ! Bizness hein ! D’accordo ?

Je lui prends donc un véritable faux Gucci, comme si ce gaillard avait jamais fait des portefeuilles, le moins cher du lot et aussitôt, le camelot empoigne ma carte. Il la retourne dans tous les sens puis finit par me déclarer très content de lui :
- Ouais ! mon fwèwe ! C’est dans le Santa Cwotché !

Et il se barre à la recherche d’un autre pigeon. C’est pas ce qui manque par ici, à plumes, sans plumes voir complètement déplumés et c’est bien ce qui risque de m’arriver si je ne reconcentre pas mon influx nerveux.
Alors qu’il est au milieu du pont, je lui crie :
- Connard va ! C’était écrit sur la carte : Il Campiello - Santa Croce - Venezia.

Il se bidonne comme un qu’aurait des ballonnements douloureux, le mec. Et puis ses copains, semblerait qu’ils ont bouffé à la même cantine car ils sont tordus de douleur.
J’vous jure, c’est gai ! Après ça, y’en a qui seront surpris du nombre de racistes qui courent les rues.

 

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