I merletti di Cenerentola

Chantal Robillard

La Cenerentola se rend enfin compte qu’on la suit. Depuis un moment, elle entend le même pas discret, feutré, dont l’allure est la même que la sienne, et qui suit son parcours pourtant hors des circuits touristiques. Une foulée d’homme, déterminée, mais qui la talonne sans se rapprocher. C’est bien ce qui lui a mis la puce à l’oreille, car elle a l’ouïe fine, l’oreille absolue et le sens du rythme.

Elle accélère sa marche, puis entre dans une église un long moment, alors qu’elle est pressée. Ouf, personne ne la suit à l’intérieur. Elle a dû fantasmer.

Mais les pas reprennent lorsqu’elle ressort et poursuit son chemin vers le quartier de la Gare centrale. Elle se rassure un peu : sans doute un étranger qui la suit, égaré dans ce dédale où seul un Vénitien peut se retrouver sans plan. Il n’ose probablement pas l’aborder ou la héler mais doit sentir qu’elle connaît son chemin, qu’elle sait où elle va.

A Venise on renonce à saisir un sens sérieux aux voies. Venise avec ses rues aux noms si rococo : rio, via, sacca, crosera, riva, ramo. A Venise, suivre son rêve mène à une inconnue.

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